A la fois élément clé et sujet motivant dans un projet d'habitat participatif , c'est aussi une source de discussions longues et parfois clivantes. Le choix d'un terrain où installer un projet d'habitat participatif est particulièrement délicat.
Pour faciliter notre approche, nous avons tout d'abord choisi de travailler en amont sur les critères de choix du terrain et la zone géographique qui nous intéresserait. Nous avons aussi choisi dès le début de notre aventure de ne pas nous lancer de suite dans l'acquisition d'un terrain mais de privilégier d'abord l'élaboration de notre projet de vie, la consolidation de notre collectif et l'éclaircissement préalable des aspects financiers et juridiques, importants selon nous.
Nos critères de choix d'un terrain
Dans nos ateliers, nous avons fini par établir une grille de critères essentiels à nos yeux, marqueurs d'un "terrain idéal". Tout en sachant que l'idéal est difficile à atteindre (nous restons optimistes :-) ) , nous sélectionnerons notre terrain suivant ces critères avec cet ordre d'importance.
Ces critères sont faits pour arrêter le choix d'un terrain le plus objectivement possible. Cela signifie que si le terrain ne répond pas à ces critères il n'est probablement pas éligible. Bien sûr, il y a certains de ces critères qui peuvent être interprétables (champs "proches", ensoleillement "suffisant", est-ce qu'une toiture en fibro-ciment est considéré comme polluant, est-ce qu'une petite départementale à proximité constitue une nuisance sonore "polluante", etc....), mais il s'agit quand même de faire les choses de façon éclairée et raisonnable, sans être ni dans le déni d'un élément négatif flagrant, ni dans l'extrémisme d'une recherche de pureté absolue du site.
Par ailleurs, un critère qui ne serait pas dans cette liste et qui ne serait pas respecté pour un terrain ne peut suffire à rejeter le terrain. Il s'agira alors d'un choix personnel et souverain d'accepter ou pas le terrain, de faire la part des choses. La recherche d'un terrain nous prend du temps, et si nous sommes trop pointilleux, nous n'y arriverons pas. Pas question de laisser de côté un terrain qui répondrait à tous nos critères ci-dessus, et de choisir de ne pas l'acquérir en pensant avoir mieux plus tard.
Nous avons marqué en BLEU les critères fondamentaux sur lesquels nous ne voulons pas transiger : si nous trouvons un terrain et si ces critères fondamentaux sont respectés, alors ce terrain nous conviendrait. Dans le cas contraire, le terrain ne serait pas retenu.
En tout cas ces critères listés là sont les plus importants pour nous et ils représentent notre idéal.
1. Environnement sain - la présence d'eau qu'on pourrait rendre potable sur le terrain (source/puits) - une bonne qualité du terrain et de son environnement (environnement naturel, sain) qui assure une bonne biodiversité (végétales, animales) et correspond à un environnement préservé - un ensoleillement et une pluviométrie suffisants (sauf cas particulier, les zones sélectionnées répondent déjà à ces deux critères) |
Surface - une surface totale suffisante : si possible 8ha ou plus, dont une partie constructible comprise entre 5000m² et 1ha (la limite basse limitera le nombre de foyers) Le reste en terre agricole, avec présence de bois et prairies, La partie principale de cette surface sera d'un seul tenant attenante à la zone constructible Nous réserverons une petite partie de cette surface pour nos activités économiques |
3. Coût - Coût maximal compris entre 160 000 € (sans bâti) et 220 000 € (avec bâti habitable existant) frais inclus. si possible présence d'un bâti existant à rénover mais habitable, éventuellement d'autres bâtis mais sans qu'ils soient nécessaires d'avoir à les rénover pour habiter (ne pas avoir trop de bâtiments à rénover, car trop de contraintes d'agencement général et de travail de rénovation)
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4. Environnement social et économique - un climat social/ voisinage proche favorable - une réglementation locale favorable - l'existence d'un bassin d'emploi local - une attractivité touristique, ou plus généralement un dynamisme local évident |
5. Typologie du terrain - une bonne qualité des sols (meuble, non pollué..) - une orientation du terrain de sud-est à sud/ouest (pas d'orientation terrain vers le Nord) et un dénivelé terrain favorable à l'écoulement des eaux et à la création de baissières - une accessibilité aisée au terrain (pas de petit chemin caillouteux de plusieurs centaines de mètres pour pouvoir arriver au terrain). - la roche mère suffisamment en profondeur (pour disposer d'une terre arable) |
Nous ne voulons pas : - les sites "pollués" ( eau, terre, air, nuisance sonore, antenne 1-2-3-4-5-.-.-.G !!) - un voisinage trop invasif (par exemple les enclaves dans le terrain, des voisinages trop proches) - un terrain avec un passif négatif (c'est important pour nous mais nous ne serons peut-etre pas capable de l'identifier rapidement) Si on peut éviter : - la présence d'un Bâtiment de France à proximité - le tout à l’égout si nous ne sommes pas obligés de nous y raccorder - le droit d'usage/ de passage - les zones inondables (possible éventuellement en bordure et contrebas de terrain et éloignés des zones habitables , d'élevage et de culture) - Un terrain "plat" (qui n'est pas favorable à l'écoulement naturel des eaux, que ce soit pour le traitement des eaux usées, pour l'acheminement de l'eau propre, pour le ruissellement des eaux de pluie... |
Nous chercherons un lieu dans un paysage agréable, un terrain pourvu d'espaces verts et de zones d'ombres, de bois et de pâtures, nous offrant la possibilité de poser des ruches à proximité. Nous aimerions aussi qu'il soit propice à l'installation d'une éolienne.
Nous sommes particulièrement sensibles à un tissu local accueillant, attractif, dynamique socialement et économiquement, proches de services publics de base.
Nous serons attentifs à la proximité des antennes 5G et autres. Cela devient très difficile de trouver des zones pas ou peu exposées. Toutefois, nous avons trouver un site sur lequel sont répertoriées les antennes en France, ce qui permet déjà de voir où on met les pieds avant d'y être : ici (merci à l'auteur de ce site pour ce travail).
Ci-dessous, une carte des zones de France les plus traitées en pesticides issues d'un travail effectué par le journal "Le Monde" en 2019.(cela donne déjà une idée sur l'orientation agricole générale de chaque coin) :
Notre zone géographique
La zone géographique est sélectionnée en partie en fonction de ces critères (notamment les critères climatologiques, d'ensoleillement, de température, de pluviométrie, de pollution potentielle) mais aussi en fonction de critères personnels aux membres du collectif engagés dans le projet (contraintes professionnelles, familiales, attirances...). Nous avons délimité au départ une zone de recherche par départements, zone qui a évolué depuis nos premiers travaux et qui se précise depuis Novembre 2021, date à laquelle nous avons ciblé nos recherches sur le sud de la Corrèze (en gros en dessous de l'axe de Brives-Egleton).
Nous précisions la mise en place des critères de choix et la recherche d'un terrain est un sujet qui nous a demandé du temps et de l'énergie pour trouver une convergence entre tous les membres. Nous avons passé beaucoup de temps à définir une zone de recherche avec ces nombreux critères.
Les lieux que nous trouverons dans cette zone ont été traités au cas par cas en fonction des critères de choix de terrain que nous avons collectivement établis et après l'avoir visité. S'il y fait trop chaud, s'il n'y a pas assez de pluviométrie, s'il n'y a pas de point d'eau, s'il existe une source polluante trop proche... nous aurions rejeté probablement le terrain. Car il est des éléments (dont ceux qui viennent d'être cités) qui nous semblent non négociables et d'autres sur lesquels nous pouvions être plus mesurés.
Et ça y est !! nous avons acheté un terrain en Mai 2023 à Albussac, entre Argentat et Tulle. On vous présente ce lieu ICI.
A méditer sur la recherche d'un terrain
Vous connaissez la fable de La Fontaine "Le Héron" ???....
Un jour, sur ses longs pieds, allait, je ne sais où,
Le Héron au long bec emmanché d’un long cou :
Il côtoyait une rivière.
L’onde était transparente ainsi qu’aux plus beaux jours ;
Ma commère la Carpe y faisait mille tours
Avec le Brochet son compère.
Le Héron en eût fait aisément son profit :
Tous approchaient du bord ; l’oiseau n’avait qu’à prendre.
Mais il crut mieux faire d’attendre
Qu’il eût un peu plus d’appétit :
Il vivait de régime, et mangeait à ses heures.
Après quelques moments l’appétit vint : l’oiseau,
S’approchant du bord, vit sur l’eau
Des tanches qui sortaient du fond de ces demeures.
Le mets ne lui plut pas ; il s’attendait à mieux,
Et montrait un goût dédaigneux,
Comme le rat du bon Horace.
« Moi, des tanches ! dit-il ; moi, Héron, que je fasse
Une si pauvre chère ! et pour qui me prend-on ? »
La tanche rebutée, il trouva du goujon.
« Du goujon ! c’est bien là le dîner d’un Héron !
J’ouvrirais pour si peu le bec ! aux Dieux ne plaise ! »
Il l’ouvrit pour bien moins : tout alla de façon
Qu’il ne vit plus aucun poisson.
La faim le prit : il fut tout heureux et tout aise
De rencontrer un limaçon.
Ne soyons pas si difficiles :
Les plus accommodants, ce sont les plus habiles ;
On hasarde de perdre en voulant trop gagner.
Gardez-vous de rien dédaigner ;
Surtout quand vous avez à peu près votre compte.
Bien des gens y sont pris. Ce n’est pas aux hérons
Que je parle : écoutez, humains, un autre conte ;
Vous verrez que chez vous j’ai puisé ces leçons.
Jean de La Fontaine